Réussir le retour
C’est la bonne nouvelle qui accompagne ce déconfinement : les Français attendent la réouverture de deux commerces en priorité, les coiffeurs et les opticiens ! On dit que 15 millions d’ordonnances dormiraient dans les tiroirs, que des millions de nouvelles prescriptions sont en attente de rendez-vous chez l’ophtalmo : si un secteur doit bien repartir, c’est bien celui de l’optique ! Les risques d’abandons sont faibles : c’est un marché qui peut reporter ses achats mais qui ne les annule pas. Les Français ont peu dépensé durant le confinement, les désastres économiques ne sont pas encore sûrs. Alors, compte tenue de la situation, les conditions d’une reprise ne sont pas si mauvaises.
D’autant que la web conférence Zeiss de jeudi dernier, sous le titre « Se préparer au déconfinement », a permis d’évoquer ce qui se passe ailleurs : « On constate dans les pays déconfinés que deux semaines après la reprise, les opticiens ont retrouvé près de 75% de leur activité. Le retour à la normale est assez rapide, même s’il y a forcément un effet de rattrapage », estime Nicolas Sériès (PDG Zeiss France).
La montée en puissance s’avère régulière. En Italie, une semaine après le déconfinement l’activité est remontée à 46% ; à plus 2 semaines l’Allemagne est à 74% ; après 3 semaines de déconfinement, l’Autriche est revenue à 83% de ses volumes optiques ; déconfinée depuis 4 semaines, la Chine est revenue à 100%. En France, le niveau est monté tous les jours depuis une semaine, pour atteindre les 17% de l’activité normale. « Avec 17% de ses volumes, l’optique française montre un trend très encourageant pour aborder le déconfinement » (Nicolas Sériès).
Si 15% des opticiens se disent « pas prêts » et 14% « inquiets » (sondage Zeiss), la majorité des professionnels reste confiante en ses propres capacités d’adaptation. Reste à transformer le point de vente et les pratiques et à le faire savoir : car la période transitoire avant un retour complet à la normale promet d’être longue.
Invité de la web conférence Zeiss, le Pr. Juvin, chef des urgences de l’hôpital européen Georges Pompidou à Paris, a rappelé quelques notions à garder en tête : « 50% des patients COVID-19 ne présentent aucun symptômes. Les malades sont contagieux 48 heures avant l’apparition des premiers symptômes. Cette période représente 50% des contagions ». La consigne est donc de bien respecter les mesures de protection mutuelle. « Pour les vêtements et les chaussures, ils peuvent être laissés sur le lieu de travail. Un lavage à plus de 60° est conseillé ». Attention également à la climatisation : même si sa dangerosité dans la transmission du virus n’est pas prouvée, le principe de précaution doit prévaloir. Philippe Juvin insiste sur un point : le virus est présent en zone verte comme en zone rouge ; il est donc impératif d’appliquer les mêmes consignes de sécurité partout en France. « Il ne faut pas être anxieux, mais raisonnablement prudent », conclut le Pr. Juvin pour qui une seconde vague épidémique semble inévitable : « 5% des français seulement ont rencontré le virus, il y aura très certainement une deuxième vague. Elle interviendra au plus tôt 3 semaines après le déconfinement. Dans tous les cas il faut faire comme s’il y allait avoir cette deuxième vague. Un nouveau confinement est totalement envisageable et le gouvernement a planché sur ce scenario ».
Voilà pour le contexte sanitaire. La reprise dépendra de la perception que le client aura de la sécurité de votre magasin et de vos pratiques. Sur le sujet, vous trouverez toutes les informations au bas de la lettre, dans les trois documents de base à consulter : les préconisations des syndicats d’opticiens (FNOF, ROF, SYNOM) ; les consignes du GIFO en termes de décontamination des verres ; les consignes du GIFO en termes de décontamination des montures.
La FNOF de son côté prône la mise en place d’un certain nombre de mesures pour accompagner les opticiens durant cette période délicate. Premièrement : abandonner le tiers payant pour soulager la trésorerie. Des tractations sont en cours, mais on sait déjà qu’une baisse de la TVA est également revendiquée (en échange d’un renoncement à la publicité, ce qui paraît donc mal parti).
Plus intéressante, la lecture que fait Alain Gerbel de l’article D 4362-13 du Code de la sécurité sociale. En invoquant la situation actuelle comme une situation d’urgence, puisque urgence il y a à délivrer à tous les Français des équipements en cette période post-déconfinement d’explosion des besoins différés, la FNOF émet l’hypothèse de se passer de l’ordonnance tout en coupant le lien avec les OCAM : plus de remboursement. « Ce n’est pas à nous de garantir les remboursements santé, estime le président de la Fédération. S’il faut ou non rembourser, ce n’est pas à nous de le dire ». Ce serait un pas de plus vers l’opticien de santé.